Le niveau des océans pourrait augmenter de plus de 20 mètres : beaucoup de villes et sites disparaitront au Sénégal

D’année en année l’érosion maritime a rongé le littoral. D’après les experts, en 50 ans la mer a avancé de 200 à 300 mètres selon les endroits. Cette avancée de la mer sur les 700 km du littoral sénégalais est attribuée au changement climatique mais également à l’action anthropique de l’homme. En pénétrant à l’intérieur des terres, l’eau de mer salinise les sols et les rend impropres à la culture. Pour tenter d’enrayer les effets désastreux des dérèglements du climat, les autorités sénégalaises ont lancé des projets de reboisement massif (qui n’a jamais connu un succès durable) et de revitalisation des terres. Mais le temps presse. A l’échelle mondiale, la situation n’est pas plus reluisante. D’après les études menées, si rien n’est fait, d’ici 2100 nous risquons de connaître une disparition de beaucoup de villes dans le monde.

L’IMPACT DE LA MONTÉE DES EAUX

L’avenir de la planète devient de plus en plus inquiétant. S’il est vrai que l’histoire géologique de la Terre nous apprend que le niveau des océans n’est pas stable, la tendance actuelle semble inquiétante voir catastrophique.

D’après les prévisions d’une étude du Groupe Intergouvernemental sur l’évolution du Climat (Giec), le réchauffement climatique en cours devrait conduire à une augmentation du niveau moyen des océans de l’ordre de 18 à 60 cm par an jusqu’en 2100. Mais ceci, sans prendre en compte dans ses calculs la fonte de la glace, car ce paramètre ne pouvait être modélisé. Or, l’élévation du niveau mondial de la mer réellement observé dépassait déjà de 50 % les projections du modèle pour la période 1961–2003, et de 80 % pour 1990–2008.

En admettant que l’humanité parvienne à limiter le réchauffement planétaire à 2°C, ce qui apparaît aujourd’hui comme hautement improbable, les résultats de cette étude suggèrent que les générations à venir devront faire face à une montée du niveau de la mer de 12 à 32 mètres par rapport à son niveau actuel !


En juin et en juillet 2014, une trentaine de personnes sont mortes à cause des pluies torrentielles qui se sont abattues sur la ville d'Abidjan. © AFP PHOTO/ISSOUF SANOGO

D’autres incertitudes demeurent car on ne comprend pas suffisamment la dynamique d’absorption de chaleur par les océans qui, en les faisant augmenter de volume, provoquant une élévation du niveau de la mer ; il en va de même pour de nombreux scénarios relatifs aux émissions futures de carbone et au réchauffement de l’atmosphère qui l’accompagne. Les conséquences seraient apocalyptiques : « une telle augmentation des océans actuels recouvrirait les côtes actuelles partout dans le monde et affecterait jusqu’à 70 % de la population mondiale », a mentionné l’étude.

En plus de cela, à cause des rejets massifs de gaz à effet de serre provenant de nos activités, la basse atmosphère se réchauffe rapidement et nous devrions donc connaître, dans seulement quelques décennies, un climat similaire à celui qui était présent il y a quelques millions d’années. En modifiant les concentrations de gaz à effet de serre de notre atmosphère, nous entrainons le climat vers un nouvel équilibre où la Terre sera radicalement différente de ce que nous connaissons.

A ce titre, on parle souvent à tort de dérèglement climatique, comme si le climat ne fonctionnait plus normalement et qu’il était chaotique. En fait non, la machine climatique fonctionne très bien et réagit à l’influence de facteurs déterminants dont les gaz à effet de serre. Nos activités font basculer le climat de la Terre vers un nouvel équilibre. Et ce nouvel état pourrait bien se traduire, comme dans le passé, par des océans dont le niveau est de 22 mètres plus élevé…

La géographie des littoraux en serait profondément modifiée : de nombreux deltas, plaines alluviales, marais, mais aussi de grandes villes (Shangaï, Hanoï, Hô-Chi-Minh-Ville, Le Caire, Londres, Miami, La Nouvelle Orléans…), des îles et des pays (Pays-Bas, Bangladesh, Cambodge…) seraient totalement ou en partie engloutis par les eaux.
 Des villes historiques comme Venise (site du patrimoine mondial et sa lagune) devraient disparaître malgré les barrières mobiles prévues (MOSE) prévues pour éviter sa submersion pendant encore quelques décennies, mais que la mer finira par atteindre un niveau tel que même leur fermeture permanente ne pourra plus protéger la ville de l’inondation.

La question n’est pas de savoir si cela arrivera, mais simplement quand.


LES RISQUES AU SÉNÉGAL

Au Sénégal, pour une élévation d’une hauteur de 20 mètres, la simulation représentée sur la figure 1 montre que la presqu’île du Cap vert sera pratiquement sous les eaux. Toute la grande côte et la petite côte seront sous les eaux avec la perte de la réserve de Faune de Ndiack, le parc de Djoudj, le parc National de Diawling, les villes de Rosso, Podor, Dagana, Richard Toll . Sur la petite côte, Joal Fadiouth, Djofor, Fatick, Niakhar, Kaolack, le Delta du Saloum, etc. disparaitront. Dans le Sud, le parc National de Varela, les villes d’oussouye, Kafountine, Ziguinchor, etc. seront rayés de la carte !



Sur la simulation de la figure 2, on constate que la situation sera moins catastrophique pour une élévation de la mer de 9 mètres mais cependant beaucoup de villes et sites se trouvant dans le Sud devraient disparaître. Si le scénario est catastrophique, il devrait se mettre en place pendant les prochains siècles. Faute d’avoir pu contrôler ses émissions en dioxyde de carbone, l’humanité devra alors imaginer et réaliser le plus grand réaménagement de territoire et les plus grandes migrations de population de son histoire…

Sachez que la probabilité pour que le niveau des océans soit compris entre 17 et 27 mètres est de 68%. Elle est de 95% pour un niveau compris entre 12 et 32 mètres. Face aux effets de ce véritable désastre écologique et humain qui pourrait menacer la cohésion sociale du Sénégal, quelle est la solution la plus appropriée ? Pour en savoir plus, nous sommes allés à la rencontre du Dr Isabelle NIANG, spécialiste de l’érosion côtière. Mais sachez que pour les politiques qui sont tenus de prendre les bonnes décisions pour nous éviter cet apocalypse, ont une échelle de temps qui se limite aux prochaines échéances électorales ce qui rend plus inquiétant cette problématique.


Pr Adams TIDJANI
Fondateur de l’Institut des Métiers de l’Environnement et de la Métrologie (IMEM)
Responsable du Master Professionnel en Environnement (HQSE)
Directeur de publication du magazine sur l’environnement « VIE »
Directeur du Laboratoire de Rayonnements (LRNA)
Faculté des Sciences et Techniques/ UCAD